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Chaque année, 3 à 4 millions de tonnes de thé sont consommées dans le monde, pour environ 297 milliards de litres bus. Quand on sait que la majorité des feuilles de thé traversent la planète pour être importées depuis la Chine, le Japon et l’Inde, forcément, on se dit que l’on aurait bien aimé pouvoir faire pousser son thé sur son balcon…
Et c’est ici qu’une bonne nouvelle parvient jusqu’à nos oreilles : des initiatives existent pour cultiver du thé en France !
Nous sommes allés à la rencontre de Gaëlle, fondatrice de Jardins de Thé, un producteur de thé à Paris et en Normandie. Elle nous en dit plus sur son métier, et sur les astuces pour cultiver votre propre thé bio.
Panda Tea : Comment vous est venue l’idée de créer Jardins de Thé ?
Gaëlle :
Je suis une fan de thé depuis toujours ! J’ai notamment eu l’occasion de vivre plusieurs mois au Japon, et de travailler dans une usine de thé. Et dans la campagne japonaise, on se rend compte que les habitants font souvent pousser leurs propres arbres à thé dans leur jardin, pour leur consommation du quotidien.
En fait, le théier est une variété de camélias. Alors, quand pendant le confinement je buvais mon thé en regardant les camélias dans mon jardin, je me suis dit « pourquoi ne pas plutôt faire pousser des camélias à thé ici aussi » ? Lorsque l’on sait que la France importe chaque année 20 000 tonnes de thé, et que la production française respectueuse de l’environnement ne représente que quelques centaines de kilos annuels, on se dit qu’il y a quelque chose à changer. J’ai acheté 300 graines que j’ai fait germer dans mon salon, et c’était le début de l’aventure !
Le thé peut donc pousser si facilement en France ?
Gaëlle :
Bien sûr ! Le camélia est une plante rustique qui supporte des hivers jusqu'à -10, -15 degrés. Ceux que l’on retrouve en France sont en réalité originaires de Géorgie, où la Russie avait développé de grandes plantations de thé pour ne pas dépendre de la Chine. Les camélias qui y poussent sont très acclimatés à nos contrées européennes.
Joséphine de Beauharnais, la femme de Napoléon, a été une des premières fans de camélias en Europe. Elle en a ramenés dans les serres du château de Rueil-Malmaison, en région parisienne. Mais il n’y a même pas besoin de serre. Quand on se promène à Paris et qu'on a un œil un peu averti, on se rend compte qu'il y a plein de camélias en pot. C'est une plante qui a un système raciné assez superficiel et peut donc bien pousser sans être en terre pour autant. Comme ceux que je fais pousser dans ma cour d’immeuble parisien !
Quel est l’avantage de produire son thé en France ?
Gaëlle :
L'objectif d'une culture en France, c'est de viser une agriculture en circuit court. En plus de réduire l’empreinte carbone liée au transport, on maîtrise la production et on s’assure de produire du thé biologique. Je suis notamment la secrétaire générale de l'association européenne des producteurs de thé, qui encourage les initiatives pour cultiver du thé en Europe sans pesticides.
Maintenant, la production de thé en France est si faible qu’il ne serait pas possible de ne consommer que du thé local. L’enjeu est donc aussi d'acheter du thé via des importateurs qui ont des cahiers des charges biologiques et respectueux de l'environnement. L’objectif est de faire évoluer la consommation mondiale vers une consommation plus éthique, comme Panda Tea.
Comment faire pousser ses théiers chez soi ?
Gaëlle :
La graine de théier germe assez facilement. En revanche, mieux vaut être patient : il faut compter deux ans pour commencer à avoir une première bouture à mettre en pleine terre. Lorsque le camélia finit par fleurir, vous pourrez utiliser les fleurs dans vos infusions, mais aussi replanter les graines du fruit dans votre jardin pour agrandir vos plantations de thé au fil du temps. Quant aux feuilles que vous allez cueillir pour faire votre thé, il s’agit des jeunes pousses : les feuilles plus petites et plus claires que les autres qui se détachent facilement du bout des doigts et se renouvelleront ensuite rapidement. Vous pourrez les cueillir environ toutes les trois semaines d’avril à octobre.
De quoi permettre quatre, cinq, six récoltes en fonction de la météo !
Une fois le théier planté et les feuilles récoltées, comment préparer son thé ?
Gaëlle :
Pour préparer son thé noir ou vert, on va jouer avec le processus naturel d’oxydation. Si l’on souhaite un thé noir, on va laisser les feuilles s'oxyder et noircir. Si l’on préfère du thé vert, on va stopper ce processus naturel en cuisant les feuilles pour permettre une fixation enzymatique. Il y a deux façons de cuire les feuilles, soit au wok à la manière chinoise pour obtenir des notes torréfiées, soit à la vapeur, à la japonaise, pour conserver les notes aromatiques végétales.
Après cuisson, il va maintenant falloir faire rouler la feuille pour casser la membrane cellulaire et développer les arômes. Cette étape peut être assez longue selon le rendu souhaité. Pour le Sencha par exemple, fameux thé vert japonais, le processus peut prendre jusqu'à 6 heures.
Enfin, la dernière étape du processus de fabrication va être le séchage. Les feuilles de thé fini contiennent généralement moins de 5% d'humidité. Cette étape prendra donc elle aussi du temps, pour obtenir un produit bien sec qui permettra une bonne conservation et le développement des arômes.